Le deuxième jour du Salon de l'entrepreneuriat féminin haïtien Haifex 2025 a été marqué par des témoignages poignants de jeunes participants qui, malgré leurs idées novatrices, disent se heurter aux dures réalités du pays.
« Nous avons des idées d'affaires, mais la situation d'Haïti nous empêche de nous lancer. Même avec de l’argent, la vie est trop difficile », confie une jeune femme, un sourire discret aux lèvres. Un sourire qui cache mal la frustration d’une génération prête à entreprendre, mais paralysée par l’insécurité et le chaos économique qui règnent en Haïti.
Schneider Laguerre, étudiant en mécanique, envisage de créer un atelier. Il décrit ainsi la situation : « Pi gro pwoblèm lan, se jan peyi a ye. Ou ka mete yon bagay sou pye, moun ki gen move kè ap kraze l »
De son côté, Saskia Pierre, une autre participante, porte un regard très sombre sur l’avenir du pays : « Dans cinq ans, je ne vois pas Haïti. Chaque jour, les choses empirent. Chaque fois qu’on garde un espoir, il s’envole. » Elle dénonce un système dysfonctionnel où les postes sont attribués sans mérite, et où les nominations se font sans aucun sens des responsabilités.
Cette perte d’espoir n’éteint pas pour autant les rêves. Francesca, une jeune femme pétillante vêtue d’une robe rouge, confie avec détermination : « J’ai un projet d’auberge familiale et de service immobilier. Juridiquement, tout est déjà en marche. Ce qui bloque, c’est le financement. Mais malgré tout, les projets restent vivants, et c’est cela qui nous permet de rester debout. »
Yoline Desruisseaux, modèle, designer commerciale et peintre, visiblement motivée, insiste sur l’importance de multiplier ce type d’initiatives. « Si nous avions accès plus souvent à ce genre d’événements, cela nous aiderait énormément, notamment sur le plan de l’éducation financière », explique-t-elle. Elle souligne également la complexité du système d’importation en Haïti, qu’elle considère comme un frein majeur pour les jeunes souhaitant se lancer dans le commerce.
Madame Yoline Desruisseaux poursuit ces mots pour espérer que des secteurs clés comme l’énergie, l’agriculture, ou la technologie puissent servir de leviers pour un développement réel. "Mwen we Ayiti nan 5 an tankou yon kote chak domèn ka pote chanjman. Nou bezwen bon modèl pou jèn yo swiv", conclut une autre jeune intervenante.
Au fil des échanges, une même volonté se dessine : rester debout, malgré les vents contraires. Tous ne croient pas en un avenir radieux à court terme, mais ils refusent de baisser les bras. Si le système déraille, leur foi en leurs propres capacités reste intacte.
Les obstacles sont nombreux : accès au financement, instabilité politique, insécurité, déficits institutionnels. Mais derrière chaque jeune, il y a un projet, une idée, une vision. C'est peut-être cela, la vraie richesse du pays.
En donnant la parole à ces jeunes, Haifex 2025 leur a permis d’exprimer leur résilience, mais aussi leurs attentes. Dans un pays souvent étouffé par les crises, leur voix sonne comme un appel à l'action, à la solidarité et à la reconstruction.
Arnold Junior Pierre
- Log in to post comments


