Par Evens Dubois.
En marge d’un forum économique « La Russie vous appelle ! » tenu à Moscou le mardi 2 décembre 2025, le president Vladimir Poutine a déclaré : « Nous n’avons pas l’intention de faire la guerre à l’Europe, mais si l’Europe le souhaite et commence, nous sommes prêts dès maintenant. »
Le président russe accuse les Européens de vouloir « empêcher » les efforts américains visant à mettre fin au conflit en Ukraine et de s’être « écartés eux‑mêmes » des négociations. Pour lui, l’Europe n’a « pas de programme de paix » et se place « du côté de la guerre ». Il s’est exprimé devant des journalistes avant une rencontre avec l’émissaire américain Steve Witkoff, envoyé special du president Donald Trump. Cette sortie, musclée du president russe, vise à river le clou aux dirigeants européens, en les décrivant comme prisonniers d’une lubie : celle de pouvoir infliger une « défaite stratégique » à la Russie. Mais derrière cette confrontation immédiate se dessine une toile plus large : celle des contradictions occidentales, des calculs géopolitiques et d’un mépris civilisationnel qui rappelle les heures sombres de l’histoire européenne.
Les capitales occidentales clament vouloir la paix, mais chaque fenêtre d’opportunité pour un cessez‑le‑feu est torpillée par des conditions irréalistes ou par un soutien militaire accru à Kiev(Capitale de l'Ukraine, siege du pouvoir central). Le mot « paix » devient une posture diplomatique, un slogan répété à l’infini mais vidé de son contenu. L’Occident le brandit comme une bannière, mais agit d'une autre facon. Il promet la fin des hostilités tout en alimentant les flammes. Ce paradoxe nourrit la méfiance et révèle une duplicité : derrière les discours, c’est la logique de l’affrontement qui domine. La mémoire des accords de Minsk II plane sur le conflit. En 2015, ce compromis avait gelé les lignes de front, donnant à l’Ukraine un répit… mais aussi le temps de se réarmer. Il s'agissait à l'epoque d'une ruse des dirigeants de l'époque: Angela Merkel et Francois Hollande. Pour Moscou, ce fut une trahison, une manœuvre dilatoire.
Aujourd’hui, la Russie soupçonne l’Occident de vouloir rejouer la même partition : un cessez‑le‑feu tactique, suivi d’une reprise des hostilités quelques années plus tard. Minsk II devient le symbole d’une paix trompeuse, de façade, une préparation à la guerre.
Le rouleau compresseur russe face au betize
Depuis quand une armée qui avance comme un rouleau compresseur, avalant du terrain à un rythme effréné, devrait‑elle baisser les armes sur ordre du perdant ? Cette absurdité, répétée en boucle par les médias occidentaux, illustre la dissonance entre la réalité du champ de bataille et la narration politique. Emmanuel Macron et ses homologues européens veulent dicter leurs conditions à la Russie, comme si Moscou devait stopper la guerre par simple injonction. L’image est saisissante : c’est comme si Hitler, après le débarquement en Normandie, avait prétendu imposer son tempo aux Alliés. Une inversion grotesque des rapports de force, une illusion entretenue par ceux qui refusent de regarder la réalité en face. Cette posture traduit une arrogance civilisationnelle : l’Occident croit pouvoir imposer ses règles même lorsqu’il n’a plus la maîtrise du terrain. Il parle de paix, mais ses conditions ressemblent à des diktats. Il exige la reddition de l’adversaire, alors même que celui‑ci avance.
Une confrontation risquée avec une puissance nucléaire
L’Occident agit comme si la Russie pouvait être traitée comme un adversaire ordinaire. Mais la Russie n’est pas un pays parmi d’autres : c’est une puissance nucléaire, une civilisation enracinée dans une histoire millénaire. La logique occidentale est celle de l’affaiblissement progressif: sanctions économiques, isolement diplomatique, soutien militaire à Kiev. Mais cette stratégie comporte un risque majeur : pousser Moscou à durcir sa posture, à se rapprocher de la Chine, de l’Inde, de l’Iran, et à bâtir un contre‑bloc. Défier une puissance nucléaire, c’est jouer avec le feu. C’est comme organiser un pique-nique au bord du volcan en croyant que la lave ne jaillira jamais.
Le racisme implicite de l’Occident face à la Russie.
Au‑delà des calculs géopolitiques, la guerre a révélé un biais plus profond : la manière dont l’Occident perçoit la Russie. Aux premières heures de l’invasion, plusieurs médias occidentaux soulignaient que les Ukrainiens « leur ressemblent », qu’ils ont « un mode de vie occidental ». Par contraste, la Russie était décrite avec des images archaïques : « barbares », « héritiers d’Ivan le Terrible », « empire asiatique ». On se souvient de cette information qui fut largement relayée : la Russie, confrontée aux sanctions occidentales, a récupéré des composants électroniques dans des appareils électroménagers comme les machines à laver pour les réutiliser dans son armement. Ce langage rappelle celui de l’opération Barbarossa, quand les nazis considéraient les Slaves comme des sous‑hommes. Aujourd’hui, le schéma se reproduit : l’Ukraine est présentée comme une frontière de civilisation, tandis que la Russie est reléguée au rang d’ennemi archaïque, hors d’Europe, hors d’humanité.
Ce racisme implicite explique pourquoi l’Occident peut parler de paix tout en alimentant la guerre, pourquoi il peut prétendre défendre la démocratie tout en refusant à la Russie le statut de partenaire égal. La guerre russo‑ukrainienne a aussi mis en lumière un parfum de revanche historique. De nombreux dirigeants européens portent dans leurs lignées familiales les ombres du passé nazi. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ou encore Kaja Kallas, cheffe de la diplomatie estonienne, ont vu leurs ascendances évoquées dans ce contexte. Chrystia Freeland, ministre canadienne des affaires étrangères, est d’origine ukrainienne par sa famille maternelle. Son grand‑père, Michael Chomiak, était rédacteur en chef du journal Krakivs’ki Visti en Pologne occupée. Ce journal était contrôlé par les nazis et servait de propagande, publiant notamment des articles antisémites et glorifiant les victoires allemandes. En 1942, Chomiak titrait par exemple « Glorieuse victoire allemande » à propos du raid de Dieppe, où des milliers de soldats canadiens furent tués ou faits prisonniers. Cette information a été révélée publiquement en 2017 et confirmée par plusieurs médias. Freeland a longtemps présenté son grand‑père comme un « combattant de la liberté », avant que les archives ne démontrent son rôle de collaborateur. Ce qui choque, c’est la manière dont certains discours semblent réhabiliter, au grand jour, une mémoire nazie au mépris des Russes qui se sont sacrifiés pour vaincre Hitler. L’image d’un ancien de la Waffen‑SS recevant une ovation au Parlement canadien illustre cette dérive : l’Occident réécrit l’histoire, il donne dans la démesure. Kaja Kallas elle‑même a affirmé que la Russie est « trop grande pour posséder toutes ces richesses dans son sous‑sol », rêvant de la dépecer en plusieurs petits États pour s’emparer de ses ressources. Ces propos révèlent une logique prédatrice qui rappelle les ambitions expansionnistes du passé.
D'autre part, ces dirigeants belliqueux atteignent le sommet de l’impopularité dans leurs pays. Inflation, crise énergétique, dépenses militaires : la guerre en Ukraine est devenue un sujet clivant. Une partie de l’opinion publique considère que les coûts sont trop lourds et que la politique extérieure est déconnectée des préoccupations internes. Cette impopularité fragilise leur légitimité et alimente le soupçon que leur politique extérieure est motivée par des calculs de prestige ou par une volonté de masquer leurs échecs domestiques.
En definitive, la guerre en Ukraine reflète non seulement les ambitions de Moscou, mais aussi les illusions de l’Occident. Elle montre que derrière les discours sur les valeurs universelles, il y a une hiérarchie implicite : certains peuples sont jugés dignes de compassion, d’autres sont condamnés à l’altérité. En traitant la Russie comme un corps étranger à l’Europe, en tolérant des relents de réhabilitation nazie et en rêvant de dépecer un pays pour s’emparer de ses richesses, l’Occident répète les erreurs du passé. Il réactive les fantômes de Barbarossa, il rejoue la vieille partition de l'arrogance, du mépris et du racisme. Mais cette illusion de supériorité finit toujours par se briser au contact de la realite.
Evens Dubois
Brooklyn,NY
12/2/25
Sources:Si l’Europe veut la « guerre », « nous sommes prêts », lance Vladimir Poutine | Radio-Canada.
L’hommage rendu par le Canada à un vétéran nazi révèle la politique à l’égard de l’Ukraine menée de longue date par Ottawa | En dehors de la boîte.
CPCML. (2017). Une fabrication d’excuses pour la ministre des Affaires étrangères. Parti communiste marxiste‑léniniste du Canada..
Plokhy, S. (2023). La guerre russo‑ukrainienne.
Baud, J. (2024). L’art de la guerre russe : Comment l’Occident a conduit l’Ukraine à l’échec.
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