PubGazetteHaiti202005

À l'ONU : La Chine rend les USA responsables du chaos dans lequel Haiti s'engouffre 

Photo : CCTV

Face à l’effondrement de l’État haïtien et à la montée en puissance de la violence des gangs armés, la Chine a élevé la voix au Conseil de sécurité de l’ONU. Le représentant permanent adjoint, Geng Shuang, a pointé du doigt les États-Unis, les accusant d’être en partie responsables de la crise actuelle, tout en appelant les Haïtiens à reprendre en main leur destin national.

Alors que la situation en Haïti ne cesse de se détériorer, la Chine a livré un discours d’une rare intensité ce lundi 21 avril 2025, au siège des Nations unies à New York. Pour Pékin, le moment est venu d’un double sursaut : un sursaut national haïtien et un sursaut de la communauté  internationale. Dès les premières lignes de son intervention, Geng Shuang a tenu à rappeler une évidence souvent oubliée : malgré la crise, Haïti demeure un pays souverain. À ce titre, il appartient d’abord aux Haïtiens de reconstruire leurs institutions.

« Il est temps que les autorités haïtiennes abandonnent la mentalité de dépendance envers l’étranger. La reconstruction d’un État fort doit partir de l’intérieur », a-t-il martelé avec gravité.

Le diplomate chinois a invité donc les différents acteurs politiques à dépasser leurs clivages et à engager un dialogue sincère. Selon lui, seule une volonté commune peut sortir le pays de l’impasse actuelle.

Par ailleurs, Geng Shuang a souligné que la tenue d’élections, bien que difficiles à organiser à court terme, reste un impératif. Sans elles, aucun processus démocratique ne saurait être légitime.  « Il est crucial que les partis fassent preuve de flexibilité et privilégient l’intérêt du peuple plutôt que les logiques de pouvoir », a-t-il ajouté, appelant à une vision à long terme, fondée sur la responsabilité et la confiance populaire.

Revenant sur les multiples missions de l’ONU en Haïti, le diplomate n’a pas mâché ses mots. Malgré plus de trois décennies de présence et de soutien, les résultats concrets restent maigres, selon lui.

« Malgré l’ampleur des efforts internationaux, les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes », a-t-il déploré. Pour lui, il est temps d’en finir avec les approches technocratiques et de privilégier un soutien plus ciblé, plus pragmatique et plus respectueux des réalités locales.


Au fil de son discours, Geng Shuang a opéré un virage plus offensif, désignant clairement les États-Unis comme un acteur majeur de la déstabilisation d’Haïti. Selon lui, Washington aurait, depuis plus d’un siècle, façonné le paysage politique haïtien selon ses propres intérêts. « Les États-Unis se comportent comme l’éminence grise d’Haïti, installant des gouvernements à leur convenance et manipulant la Constitution », a-t-il affirmé sans détour.

Plus encore, il a souligné l’incohérence américaine : après avoir dirigé les négociations de transition politique l’an dernier, Washington resterait désormais passif face au chaos actuel. « Ils détournent le regard, faute d’intérêt politique », a accusé Geng.


L’ambassadeur adjoint a également dénoncé l’inefficacité de l’embargo sur les armes imposé par le Conseil de sécurité, accusant les États-Unis de n’avoir rien fait pour en empêcher la violation. Résultat : les groupes armés haïtiens seraient aujourd’hui mieux armés que la police nationale.

« Les armes continuent d’affluer depuis la Floride. C’est une situation intenable et inacceptable », a-t-il déclaré, appelant à une coopération régionale renforcée pour enrayer ce trafic.

En outre, Geng Shuang a critiqué la timidité de la contribution américaine à la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS). Selon lui, Washington chercherait même à déléguer la charge financière à la communauté internationale, en transformant la mission en une opération de maintien de la paix onusienne. « C’est une manœuvre inéquitable et irresponsable », a-t-il dénoncé.
Enfin, Pékin s’est insurgé contre l’imposition par les États-Unis d’un tarif douanier de 10 % sur les produits haïtiens, une décision jugée « cruelle, absurde et profondément navrante ». Pour Geng, une telle mesure ne fait qu’aggraver la vulnérabilité économique d’un pays déjà à genoux.


En conclusion, la Chine a appelé la communauté internationale à maintenir son soutien à Haïti, mais avec discernement. L’aide extérieure, a rappelé Geng Shuang, ne doit pas entretenir une logique d’assistanat.

« La voie vers le développement passe par l’indépendance, la résilience et l’unité du peuple haïtien. L’avenir d’Haïti appartient aux Haïtiens », a-t-il lancé, comme un dernier appel à la responsabilité collective.

Arnold Junior Pierre

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