PubGazetteHaiti202005

Haïti-Dossier CAS: 6 personnes inculpées dont Pierre Ricot Odney, ministre des affaires sociales

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Le juge d'instruction Jean Wilner Morin a finalement rendu mi-septembre son ordonnance dans le dossier de corruption à la Caisse d'assistance sociale (CAS) impliquant de hauts cadres de l’institution. Cette ordonnance inculpe 6 personnes en l’occurrence, le ministre des affaires sociales et du travail, Pierre Odney Ricot, l’ancienne directrice Edwin Tonton,  Yvrose  Alcide, Pierre Richard Vales, l’ancien directeur Frantz Idrice, Joanne Phanord.


La boucle est finalement bouclée. Le juge Jean Wilner Morin a enfin rendu son ordonnance dans laquelle sont inculpées 6 personnes dont le ministre des affaires sociales et du travail Odney Pierre Ricot, l’ancienne directrice Edwin Tonton, l’ancien directeur de l’institution Frantz Iderice et d’autres cadres comme Yvrose  Alcide, Pierre Richard Vales et Joanne Phanord. Le dossier est déféré au tribunal criminel sans assistance de jury pour y être entendu. 

Le juge Jean Wilner Morin renvoie le ministre par devant le tribunal criminel siégeant sans assistance de jury pour abus de fonction conformément à l'article 5.5 de la loi du 12 mars 2014 portant prévention et répression de la corruption et pour complicité des infractions reprochées à Edwine Tonton.

Dans cette ordonnance, le juge Jean Wilner Morin ordonne que tous les inculpés à l'exception de PIERRE RICOT ODNEY soient pris de corps et conduits dans la maison d'arrêt s'ils ne le sont pas déjà. 

S’agissant de l'ex-mairesse de l'Arcahaie Rosemila Petit-Frère, elle est pour l’instant, épargnée. Elle avait refusé de comparaître à plusieurs reprises. 

Dans son ordonnance, le juge indique  qu'une ordonnance a été signifiée au directeur du service de l'immigration et de l'émigration aux fins d'acheminer à son cabinet d'instruction la liste des voyages contenant les entrées et sorties de Madame Rosemilla Petit Frère Sainvil mais aucune suite n'a été donnée à l'ordonnance.

Il dit avoir adressé une ordonnance à l'UNITE CENTRALE DE RENSEIGNEMENTS FINANCIERS (UCREF) pour une enquête sur les avoirs de Mme Rosemilla Petit-Frère Sainvil mais le résultat de cette enquête n'est pas encore disponible. Le délai d'instruction arrivant à expiration et que des inculpés sont en détention préventive et qu'il faut respecter leur droit, le rapport d'enquête de l'UCREF sur Rosemila Petit-Frère non disponible pour l’instant peut être toujours transféré au Parquet pour les suites de droit. Le commissaire du gouvernement peut toujours s'il l'estime nécessaire saisir le cabinet d'instruction pour suivi judiciaire, précise l’ordonnance.


Le juge Jean Wilner Morin a hérité de ce dossier après que l’ULCC a produit un rapport sur « un réseau mafieux » existant au sein de la Caisse d’Assistance Sociale (CAS).  Il faut revenir en 2022 pour tout comprendre. Le lundi 11 juillet 2022, des enquêteurs de l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC) ont effectué une descente dans les locaux de l’institution à Port-au-Prince. Sur les lieux, les enquêteurs ont pris le contrôle du périmètre et ont saisi provisoirement les téléphones portables des responsables et des employés qui étaient présents. 

Outre l’audition de la Directrice de la CAS Edwine Tonton et certains employés , les agents de l’ULCC ont procédé à la vérification de la base de données de la CAS. Et c’est là que l’ULCC a commencé à faire des découvertes étonnantes et troublantes. Celles-ci ont été rapportées dans ce document.

Lors de cette perquisition, l’ULCC a saisi l’ordinateur de Pierre Richard Vales, comptable en chef de la CAS. La commission a constaté que par le biais de deux organisations fictives appelées « Intégration des Jeunes Défavorisés pour une Nouvelle Haïti (IJDNHA) » et « Organisation des Jeunes pour le Rehaussement de l'Entreprenariat en Haiti (OJREH) », ce dernier a détourné les fonds de la CAS. « Pour les deux (2) projets déposés par ces organisations, la CAS avait accordé en avril 2022 à «< IJDHNA » et à « OJREH », une subvention d'un million (1, 000, 000.00) de gourdes à raison de cinq cent mille (500,000.00) gourdes par organisation. De plus, en août 2022, « OJREH » et « IJDHNA » ont encore bénéficié de la CAS d'une subvention d'un million (1, 000, 000.00) de gourdes, à raison de cinq cent mille (500,000.00) gourdes par organisation », avait révélé l’institution, soulignant que ces deux organisations n’existent que de nom. Pour parvenir à ses fins, Vales, le comptable en chef de la CAS, a bénéficié de la complicité du nommé Jerry SAINTAMA qui a signé comme trésorier de «IJDHNA» et coordonnateur de «OJREH». Jerry SAINTAMA étant le frère du témoin de mariage de M. VALES. « Interrogé sur ce fait en date du 24 novembre 2022, M. VALES a répondu qu'en tant que citoyen, personne ne peut l'empêcher de déposer une demande de subvention à la CAS pourvu que celle-ci ne soit pas un cas de trafic d'influence », avait rapporté l’ULCC. Vales n’avait pas qu’une corde à son arc. Selon l’ULCC, il s’est associé avec le nommé Dominique Hector BERNARDIN en vue de détourner une subvention octroyée à l'organisation dénommée « OCHAN-HAITI » ayant son siège social à la «rue Jean Philippe, impasse Bolivar, Carrefour Feuille, Port-au-Prince, Haïti ».

« Le nommé Dominique Hector BERNARDIN a falsifié une copie de l'attestation délivrée par le Ministère des Affaires Sociales et du Travail à l'organisation « OCHAN-HAITI » ainsi que sa matricule fiscale afin de recevoir la subvention de cent mille (100,000.00) gourdes qui lui était destinée suite à une demande adressée au directeur d'alors de la CAS, M. Frantz IDERIS le 18 septembre 2021. Cependant, sans le concours d'un fonctionnaire de la CAS, le nommé Dominique Hector BERNARDIN n'aurait pas pu avoir accès au dossier déposé par l'organisation « OCHAN-HAITI » jusqu'à falsifier son attestation et sa matricule », avait détaillé l’ULCC. Dans son audition août 2022, selon ce qu’a rapporté l’ULCC, M. Pierre Richard VALES, a confirmé que son Service a bel et bien remis le chèque au nommé Dominique Hector BERNARDIN « parce qu'il s'était présenté avec l'accusé de réception de la correspondance de demande de subvention, la matricule fiscale de l'organisation, une copie du projet déposé, du certificat de patente et de son attestation enregistrée au MAST ». Cependant, pour pouvoir retirer un chèque de subvention au Service de la comptabilité de la CAS après approbation de la demande, la personne désignée à cet effet par l'organisation doit nécessairement faire partie des signataires de la lettre de demande de subvention adressée par l'organisation bénéficiaire. Elle doit en plus présenter une pièce d'identification valide, l'attestation de l'organisation et la matricule fiscale de l'organisation. Elle est tenue par ailleurs de signer à la fois le bordereau de décaissement et le cahier de livraison des chèques de subventions octroyées aux organisations.


L’ULCC a reproché à M. Vales l’énorme erreur de ne pas s'assurer que les chèques de subvention soient livrés à leurs véritables destinataires alors qu’il était comptable en chef depuis février 2022. Ce n’est pas tout. Au cours de l'année fiscale 2021-2022, VALES a ajouté dans les différentes listes des personnes bénéficiaires de subventions, les noms de ses proches dont ceux de sa femme, Manouche ARELUS VALES, de sa belle-sœur Raymonde ARELUS et un autre membre de sa belle-famille, Roody ARELUS. « Suivant les données recueillies dans le cadre de l'investigation, les proches de M. Pierre Richard VALES ont pu ainsi bénéficier de chèques de subvention évalués au total à un million sept cent soixante-cinq mille (1,765,000.00) gourdes durant un seul exercice fiscal », indique l’ULCC, reprochant le comptable d’avoir pris directement un intérêt dans cette opération. « Il a commis ainsi un acte de prise illégale d'intérêts, fait prévu et puni par l'article 5.13 de la loi du 12 mars 2014 portant prévention et répression de la corruption », avait précisé l’ULCC. Vales n’était que la pointe de l’iceberg. Une autre fonctionnaire de l’ULCC est aussi épinglée dans cette enquête.  Mme Yverose ALCIDE, fonctionnaire du MAST et membre du cabinet de l'actuelle Directrice de la CAS, Madame Edwine TONTON, a abusé de son influence en vue d'obtenir durant le mois de janvier 2022, une subvention d'un montant de cinq cent mille (500,000.00) gourdes au profit de son organisation dénommée «< AFPD/PV» identifiée par son numéro d'immatriculation fiscale: 000-635-678-9, selon l’institution.

L’Unité de Lutte Contre la Corruption reproche à Alcide d’avoir commis un acte de trafic d'influence passif au même titre que Mme Edwine TONTON, Directrice de la CAS qui a agréé l'octroi de cette subvention sollicitée par Mme ALCIDE. Par ailleurs, la commission a constaté qu'il existe un véritable laboratoire de production de faux documents officiels au sein du Service informatique de la CAS. L’institution a repéré plusieurs pièces d'identité et documents légaux (patentes et matricules fiscales) falsifiés. « Ces fausses pièces sont produites par des employés affectés à ce Service et qui utilisent dans l'accomplissement de leur forfait des photos, des lieux de naissance, des noms et prénoms divers. Il importe de signaler que la majorité de ces fausses identités figurent sur la liste des bénéficiaires de la CAS », avait précisé le rapport d’enquête. Aussi, de fausses attestations d'enregistrement d'organisations au Ministère des Affaires Sociales et du Travail (MAST), de faux certificats de patente, une carte d'immatriculation fiscale trafiquée d'une durée de validité de cinq (5) ans d'une organisation appartenant à Cedor Celisoi, un employé de la CAS, des pro forma, des reçus de paiement avec la CAS comme client, des contrats de bail falsifiés, de fausses attestations de licence et de relevés de notes de baccalauréat et enfin un faux procès-verbal de prestation de serment au Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince d'un pasteur répondant au nom de Davidson Beldorin et une fausse autorisation délivrée par le Ministère des Cultes autorisant le Tribunal de Première Instance à recevoir la prestation de serment d'un pasteur nommé Clarus Raymonvil ont été découverts, Ces divers cas, selon l’ULCC, reflètent les défaillances de la structure administrative de la CAS mais aussi l'inertie et le laisser-aller des responsables qui n'ont pas pris les mesures nécessaires pour redresser la situation.

 

 

 

Par: Daniel Zéphyr

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