PubGazetteHaiti202005

4 semaines de « Pays Lock », des familles déjà plongées dans une misère abjecte

Source: Afrizap

Quatre semaines déjà et le pays est toujours en mode " lock". Cette situation est due à des mouvements de protestations partout et ailleurs contre la rareté de carburant et la vie chère. Cloitrées chez elles, des familles qui, hier encore, pouvaient se targuer de faire ou de donner à manger, deux fois par jour, au moins, à leurs enfants et dépendants, sont plongées dans une pauvreté extrême.

 

Elles étaient longtemps assiégées chez elles par peur des exactions des gangs et du kidnapping en cascade. Cette opération de « Pays Lock » remue le couteau dans la plaie. Quatre semaines déjà depuis que les mouvements de mobilisation paralysent tout. Grandes entreprises, petit commerce, tout est au point mort.

 

Aux avis de plusieurs économistes, la majorité des familles haïtiennes vivent au dépens de ce que gagnent les conjoints chaque jour. Certains sont des petits commerçants, d’autres des manufacturiers et même des chômeurs déguisés. A chaque soubresaut économique ou politique, ces familles longent la liste des démunis. Actuellement, ces familles sont actuellement au bord du gouffre. La persistance de la crise les tétanise dans une misère noire au superlatif.

 

Pieds nus sur le macadam brûlant du Champ de Mars, le visage ruisselant de sueur, Jean 35 ans, père de famille, quémande à des personnes aussi pauvres que lui. « Pour vivre et nourrir ma famille durant ces moments difficiles, je deviens mendiant. Chaque jour, ce sont des amis qui m'aident à trouver de quoi manger et nourrir les enfants. Chacun, selon sa poche, me donne 100g, 150 jusqu' à 500 gourdes etc », explique Jean, croyant mordicus que dans tout pays sérieux, « la nourriture ne devrait être un luxe pour aucun citoyen. »

 

Jean réside à Cité Soleil, le plus grand bidonville de Port-au-Prince. Lui et sa famille ne vivent actuellement que d'aumônes. « Il y a quelque temps, je pouvais nourrir comme cela se doit ma famille. Les mobilisations populaires ont causé mon licenciement à mon travail. Ils m’ont remercié par faute de liquidité », détaille Jean, la voix en sanglot.

 

A quelques mètres de Jean, Fabienne, une marchande de condiments alimentaires étale ses produits. « Je ne peux pas manger comme à l'ordinaire. Ce sont mes voisins qui me supportent parfois », nous explique la mère de deux enfants. « Je ne sais pas quoi répondre aux cris de mes enfants qui me demandent de temps en temps de la nourriture et de l'eau », dit la résidente de Bel-Air.

 

Tout comme Jean, Fabienne vit une situation de misère agressive et abjecte, provoquée par toutes les restrictions des mois de « peyi lòk » couplés à ceux de confinement en raison des exactions des gangs et des mouvements de protestation. Mais, Fabienne a du mal à se lancer dans le monde de la mendicité.

 

Toutefois, en dépit des conséquences désastreuses qu’engendre la crise, ces Haïtiens encouragent le maintien de la mobilisation. « Ariel Henry doit quitter le pouvoir car nos conditions de vie n’ont jamais été aussi criantes. Je suis sûr que l’après Ariel Henry sera meilleur », lâche Fabienne.

 

Paradoxalement, le chef du gouvernement joue pieds et mains pour se doter d’un nouvel accord afin de gagner en légitimité et consolider son pouvoir. Intervenant sur Radio Kiskeya, le Dr Louis Gérald Gilles signataire de l'accord du 11 septembre, a indiqué qu’un accord pourrait être signé entre ce mardi et mercredi 5 octobre entre Fritz Jean président élu de l'accord de Montana, Ariel Henry représentant de l'accord du 11 septembre et des partis non-alignés. 

 

Selon le document d'accord en cours de finalisation, le premier ministre Ariel Henry devrait garder son poste et aura à ses côtés le Haut Conseil de Transition (HCT) qui sera dirigé par l'économiste Fritz Jean comme président.

 

Cette information a été bottée en touche par Fritz Jean qui la qualifie de « blague ». « Au nom de quoi je vais signer cet accord », s’est demandé l'ancien gouverneur de la Banque Centrale, lors d'un entretien exclusif accordé au journal.  

 

Entre-temps, la population ne décolère pas. Haïti est dans sa quatrième semaine de paralysie totale avortant la rentrée scolaire et la rentrée judiciaire.

 

 

Gédéon DELVA

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