PubGazetteHaiti202005

Rentrée scolaire du 3 octobre complètement boudée dans la capitale et des villes de province 

Photo internet

La date du 3 octobre ramène la rentrée des classes en Haïti. Nos constats à Port-au-Prince et dans des villes de province montrent que les écoles ont boudé la rentrée des classes du Ministère de l’Education et de la Formation Professionnelle. 

 

Le coup de communication était presque parfait avant même la date du 5 septembre préalablement adoptée pour la rentrée des classes. Réouverture de certains établissements autrefois fermés pour question de sécurité, "Livre unique" en créole pour les classes de première et de deuxième année fondamentale, baccalauréat technique et forums quotidiens, le ministre Nesmy Manigat a tout fait pour convaincre. Mais les réalités sur le terrain sont telles qu’elles sont: pénurie de carburant, mouvements de protestation marqués par des scènes de violences et pillages pour le départ du Premier ministre Ariel Henry, insécurité provoquée par des gangs armés, etc. 

 

Ce 3 octobre, date adoptée en conseil des ministres pour la réouverture des classes, les salles sont vides. Les élèves n’y ont pas mis les pieds. Les parents, tailleurs et syndicats ne semblent pas être au courant.

 

À Port-au-Prince, sur l’autoroute de Delmas, les uniformes à carreaux ne sont pas remarqués. Les blouses blanches mariées de couleurs différentes ne rayonnent plus. Les longues queues des élèves pour se frayer un tap-tap ne sont pas constatées.

 

À Jérémie, les écoles ont gardé leurs portes fermées. La fièvre de la rentrée des classes n’est pas ressentie dans cette ville qui a connu plus de trois semaines de protestation contre l’augmentation des prix des produits pétroliers et qui continue d’ exiger la démission du Premier ministre Ariel Henry.

 

Dans le département du Nord-Est, c’est le même constat. Les écoles nationales et écoles privées n’ont pas rouvert leurs portes. Même remarque à Port-de-Paix, Carrefour, Cap-Haïtien et Gonaïves.

 

Depuis ce week-end, certaines écoles avaient déjà annoncé qu’elles garderaient leurs portes fermées malgré la date du 3 octobre pour la rentrée des classes. Ce, en raison des mouvements de protestations dans les rues et de la pénurie du carburant.

 

Dans une note adressée aux parents, l’institution Saint Louis de Gonzague a informé « qu’elle ne reçoit pas d’élèves le 3 octobre 2022 et cela jusqu’à nouvel ordre ». Pour sa part, la conférence haïtienne des religieux a décidé de « surseoir […] sur la réouverture des classes prévue pour le lundi 3 octobre en raison de la situation de violence et d’insécurité qui règne dans le pays ».

 

La Direction générale du Collège Cœur Immaculé de Marie (CIM) n’est pas en reste. Elle a informée qu’elle décide « d’observer l’évolution de la situation sociopolitique et éviter le risque d’exposer les élèves à des situations d’insécurité et de violences des rues que personne ne peut, maintenant, évaluer objectivement »

 

D’autres écoles ont préféré travailler avec les élèves à distance dans l’optique de ne pas les exposer à l’insécurité grandissante et les balles perdues des bandits armés. C’est le cas du collège Marie-Anne et de bien d’autres du secteur catholique.

 

Ce même lundi 3 octobre, le Ministère de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle dans un communiqué de presse a confirmé la date du 3 octobre pour la rentrée des classes tout en disant s’attendre « à une rentrée progressive des classes ». 

 

Le MENFP rapporte que « le gouvernement s’engage à créer un cadre sécuritaire approprié et un dispositif adéquat afin de faciliter le déplacement de la population en général et des écoliers, en particulier ».

 

Il y a quelques jours, plusieurs syndicats ont fustigé le comportement du gouvernement haïtien par rapport au maintien de la date du 3 octobre alors que les conditions ne sont pas réunies. « Le gouvernement n’a pas pensé qu’il fallait prendre des dispositions préalables pour faciliter la rentrée des classes. C’est le gouvernement qui bloque la rentrée des classes », avait réagi la syndicaliste Magalie Georges, voulant pour preuve l’augmentation des prix des produits pétroliers. « C’est une augmentation de 128%. C’est un chaos planifié », a-t-elle qualifié.

 

 Cette augmentation des prix des produits pétroliers reste le véritable facteur causal de la situation de chaos sévissant dans le pays. La population ne cesse de cracher sa colère dans les rues. Des écoles ont été endommagées, d’autres ont été saccagées et pillées. « C’est dans cette condition que vous voulez faire la rentrée des classes ? », questionne Mme Georges.

 

Cette pénurie de carburant impacte considérablement le transport en commun. Les Tap-Tap n’existent presque plus. Le peu de parents désireux d’envoyer leurs élèves à l’école ne peuvent trouver du carburant pour le transport des élèves. D’autres ne peuvent trouver de transport en commun. Au vu des circonstances, d’autres n’entendent pas envoyer leurs élèves à l’école au risque de se faire kidnapper ou tomber sous des balles assassines.

 

Ce week-end, le puissant chef de gang Barbecue avait lancé une mise en garde contre les parents désireux d’envoyer leurs élèves à l’école. Il leur a demandé de garder leurs enfants chez eux jusqu’à nouvel ordre.

 

Entre-temps, la crise perdure. Pénurie de carburant, d’eau, de produits alimentaires sur lesquelles s’est greffée une insécurité en cascade, et comme si ça ne suffisait pas, l’épidémie de choléra s’invite à la table des calamités haïtiennes. Déjà 8 morts ont été enregistrés par le Ministère de la Santé Publique et de la Population. 

 

 

Par: Daniel Zéphyr

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