PubGazetteHaiti202005

RNDDH dresse un tableau sombre de la violation des droits humains en Haïti dans son dernier rapport

Pierte Esperance, resp RNDDH



Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) dans son dernier rapport de 29 pages paru le 05 mai dernier a dressé un panorama catastrophique des violations flagrantes des droits humains en Haïti pour les mois de mars et d'avril 2020. Et après avoir analysé les différentes situations où les droits de la population sont foulés aux pieds par les autorités étatiques, il a fait plusieurs recommandations à celles-ci.

Ce rapport divisé en sept points principaux, passe en revue le contexte sociopolitique du pays bien avant l'arrivée de l'épidémie du Coronavirus.

Le RNDDH grâce aux supports de ses structures regionales a pu décrire la situation dégradante des centres hospitaliers qui soignent des patients malgré leur manque de matériels adéquats. Il a également observé les conditions dans lesquelles vit la population carcérale dans différents prisons et commissariats du pays au temps du Covid-19. Et aussi, le mode d'organisation du transport en commun et les marchés publics.

De la situation des hôpitaux

Selon le RNDDH, bien avant l'apparition de la pandémie de Covid-19, les hôpitaux et les centres de santé du pays étaient totalement démunis de matériels appropriés pour soigner les personnes atteintes du virus. A côté de ces manquements, le personnel médical de certains hôpitaux et centres de santé sont dépourvus d'informations suffisantes pouvant orienter les personnes présentant des symptômes liés à la maladie à un centre de prise en charge, a renchéri le rapport. De plus, dit-il, "le protocole de prise en charge n'est pas clairement établi pour tous les hôpitaux et les centres de santé".

Dans certains hôpitaux et centres de santé, le RNDDH et ses structures regionales ont relevé plusieurs installations de citernes d'eau pour le lavage des mains. Cependant, les personnels soignants ne portent que rarement des masques et des gants pour se protéger contre le  Covid-19. Quelques patients qui fréquentent ces hôpitaux et centres de santé se sont munis de cache-nez, d'autres n'en ont pas à cause du prix exorbitant de ce produit dans certains endroits du pays, a fait savoir le RNDDH.


Des marchés publics


En dépit de l'installation des réservoirs pour se laver les mains dans certains marchés publics, les mesures de sécurité ne sont pas respectées par les marchands(des) et les acheteurs(teuses), a constaté les responsables du RNDDH. La majorité des marchands(des ) et les autres usagers des marchés publics ne portent pas de masques et ne respectent pas la distanciation physique établie par l'Etat afin de limiter la propagation du virus. D'autres ne croient même pas à l'existence de la maladie, si l'on se fie aux propos recueillis et rapportés par le RNDDH.

Dans certains marchés, le mode de fonctionnement reste le même. Pour d'autres, il y a réduction du nombre d'heures et de jours de fonctionnement. Certaines autorités municipales et de la protection civile de plusieurs marchés visités par le RNDDH et ses structures déconcentrées ont organisé des séances de formations et de sensibilisation pour les marchands(des ) et des agents de sécurité. Il y a des marchés où les responsables n'ont autorisé que la vente des produits alimentaires et d'autres produits jugés nécessaires pour les consommateurs. Alors qu'il y a des marchés où l'on ne se soucie d'aucunes règles sanitaires.


Du transport en commun 

En dépit des efforts déployés par certaines mairies, l'organisation du transport en commun en Haïti n'a pas trop changé à l'ère du  Covid-19. Si certains chauffeurs acceptent de réduire le nombre de passagers(ères), d'autres continuent de fonctionner comme d'habitude, a indiqué le rapport du RNDDH. Certains chauffeurs, a-t-il ajouté, sont mécontents de cette décision, parce que l'Etat ne leur donne aucun accompagnement.

Situation dans les prisons

Au moment de la crise liée à l'épidémie du Coronavirus, le rapport du RNDDH a décrit une triste réalité de la population carcérale haïtienne. Ces personnes privées totalement de leur liberté vivent dans des conditions inhumaines et dégradantes à l'intérieur des centres carcéraux exigus, sales et non aérés. Non seulement les prisons sont trop étroites pour gérer la quantité des détenus, mais aussi les aliments distribués ne respectent pas les normes d'une bonne alimentation. Ce qui engendre le plus souvent la dégradation de la santé des prisonniers et les expose au risque élevé de contamination à la Covid-19. La façon dont on traite les détenus constitue pour le RNDDH une violation flagrante des droits humains.

Ajouté à cela, il y a des prisonniers qui ont déjà épuisé leur peine, mais qui continuent de croupir dans les espaces carcéraux pour des raisons liées au mauvais fonctionnement du système judiciaire haïtien. Il y en a d'autres qui passent plusieurs années en prison sans se présenter par devant les juges compétents capables de trancher sur leur sort.

Par ailleurs, Le RNDDH a salué les efforts et la volonté du pouvoir judiciaire qui a pris récemment la décision de désengorger les prisons en libérerant des dizaines de détenus afin de limiter la propagation du virus. Mais cette quantité de prisonniers mise  en liberté est jugée insignifiante par le RNDDH, par rapport au nombre de détenus. Vu le mauvais l'état de leur santé, bien d'autres pourraient bénéficier de ces avantages, a argué le rapport.

Des mesures de distanciation violées

L'Etat a pris la décision de fermer le pays dès le premier jour où l'on a découvert les deux premiers cas de Covid-19. Alors plusieurs Centres de Réception et de Livraison de Documents d'Identité (CRLDI) continuent de livrer des services aux citoyens désireux de se procurer de la carte d'identité unique , a fait remarquer  le RNDDH. Si certains de ces centres ont diminué leur nombre d'heures de services et la quantité de personnes reçues par jour, d'autres gardent les mêmes comportements d'avant. Des marées humaines majoritairement dépourvues de matériels pour se protéger contre la maladie se sont massées devant ces bureaux de l'Etat. Sans même appliquer la distanciation physique exigée par les autorités. Ce qui constitue pour le RNDDH une violation grave du doit à la vie de ces citoyens par l'Etat.

Des gangs armés/ Violences policières

Si le  Covid-19 a réduit grandement les activités au pays, les hommes armés qui sèment la terreur dans les quartiers populaires n'ont pas chômé, ont constaté les responsables du RNDDH. Pendant la période de l'état d'urgence, le nombre des personnes tuées par balles n'a pas diminué, surtout dans l'aire métropolitaine de Port-au-Prince. Le RNDDH a également étalé le nombre des citoyens morts ou blessés innocemment lors des affrontements entre gangs rivaux.

Le RNDDH a également déploré les bastonnades et les agressions verbales et physiques dont les membres de la population ont été victimes de la part des agents de la Police Nationale d'Haïti notamment des journalistes. Selon le rapport, ces actes odieux commis par des policiers constituent une antrave aux droits à liberté de la population haïtienne. Car a-t-il estimé, ces agents qui ont matraqué et agressé verbalement des citoyens qui ne respectent pas le couvre-feu confondent l'état d'urgence avec l'état de siège.

Face à la mauvaise gestion de la crise sanitaire et au non respect des droits humains dans le pays, le RNDDH à travers ce rapport a fait plusieurs recommandation à l'Etat haïtien:

L'organisne de droits de l'homme demande d'augmenter les lits afin d'accueillir plus patients infectés à la Covid-19. Les responsables du RNDDH exigent des autorités étatiques la multiplication de la capacité du pays en unités de soins intensifs pour pouvoir sauver la vie des personnes atteintes du covid19. Il suggére d'aménager des espaces de mise en quarantaine dans les hôpitaux du pays, ainsi que de former des personnes aptes à faire des prélèvements et des tests sur les cas suspects dans les chefs-lieu des dix Départements géographiques du pays.

Le RNDDH a aussi exigé des responsables de l'Etat de mettre à disposition des hôpitaux et centres de santé du pays des matériels suffisants dont des blouses, des gants, des masques de protection et autres . De plus, il leur a recommandé de faire respecter les ordres de libération des détenus suivant les critères exigés par les autorités compétentes également de se pencher sur les dossiers des prisonniers dont les cas nécessitent un regard particulier.

Enfin, les responsables du RNDDH exhortent l'Etat haïtien d'ouvrir une enquête sur les cas de bastonnades et des agressions physiques et verbales dans lesquels plusieurs policiers sont impliqués et de sanctionner les fautifs selon les prescrits de la loi.




Marc Wisly HILAIRE

Category

Politique

Culture

Economie

Sport