PubGazetteHaiti202005

Le sit-in contre l'insécurité et le kidnapping devant la résidence officielle du Premier ministre Jouthe dispersé à coups de gaz lacrymogène

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Des agents du CIMO qui montaient la garde devant l'entrée de la résidence officielle du Premier ministre Jouthe ont fait usage du gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc pour mater ce sit-in organisé ce mardi 19 janvier contre le kidnapping à l'initiative de l'économiste Etzer Émile. Le message a été délivré au PM Jouthe où les protestataires ont exigé la fin du kidnapping et le respect du droit à la vie.

Les quelques dizaines de manifestants ont buté sur une escorte d'agents de CIMO stationnés devant l'entrée principale de la résidence officielle du Premier ministre Joseph Jouthe, chef du CSPN. 

Le chef de file du mouvement, l'économiste Etzer Émile explique que « le sit-in c'est pour dire en tant que citoyens que nous sommes fatigués de vivre dans cette situation. Après plus de 200 ans d'histoire, c'est anormal que nous soyons obligés de marcher pour dire que nous voulons vivre, qu'on veut respirer », s'indigne l'économiste Émile qui dit vouloir s'adresser directement au Premier ministre qui est le premier responsable de la sécurité du pays en tant que chef du Conseil supérieur de la Police nationale. 

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" La vie nocturne en Haïti n'existe plus. On n'est plus capable de profiter de nos plages en week-end, de faire le touriste local. Nous sommes prisonniers dans notre propre pays. Et on n'a pas l'impression que l'État soit sensible à cela parce que (les autorités) peuvent circuler librement avec une escorte de police. Nous sentons la peur même quand nous sommes à la maison", Etzer Émile décrit la situation avec frustration et attend des actions de la part des autorités.  

Louino Robillard, de Konbit Solèy Leve, crache sa colère avec des larmes aux yeux. "La sécurité est un droit. Nous ne faisons pas trop d'exigence à l'État sinon nous voulons vivre. La vie des gens est banalisée quotidiennement. Les autorités ont refusé d'être sensibles à ce que représente la vie des Haïtiens. Nous avons peur de circuler, de vaquer à nos occupations, même quand nous sommes chez nous. Nous voulons dire que nous voulons vivre en paix", peste le natif de Cité Soleil.
Il s'interroge sur le sens et la raison d'être de la politique si la vie des gens ne devient pas une priorité, si le bien-être en est pas l'objectif.

Les protestataires demandent une chance pour que la population puisse vivre dans son pays. "La vie est un droit, circuler en est un également", répètent-ils dans la foulée. 

"De nos jours, on voit que la peur habite la population à cause du kidnapping qui n'épargne personne. Ce phénomène est bien planifié pour décourager les jeunes d'aller migrer dans un autre pays ou de mourir. Des hommes et des femmes se sont combattus contre l'esclavage, l'injustice sociale. Maintenant, les Haïtiens se méfient l'un de l'autre. Ils ont peur de manifester pour défendre leur droit. Tout le monde ne peut pas quitter le pays", enchaîne M. Robillard. 

"Les autorités doivent prendre leur responsabilité et éviter de réveiller la colère de la population. La population devient lâche cependant, quand un lâche se met en colère, il peut faire des dégâts énormes. Donc, pour éviter de projeter cette image, nos autorités doivent assumer leur rôle. On n'a pas de moyens pour payer comme rançon pour notre libération", fustige le Soléen. 

Le sénateur Francenet Dénius lui, lance un appel à tous les secteurs clés de la vie nationale. "Tout le secteur doit se mettre debout pour mettre un terme au phénomène de kidnapping. Quand les ravisseurs demandent à une personne 50 ou 100 mille dollars comme rançon, on ne l'a pas seulement décapitalisé, on l'a appauvri pendant un certain temps", tel est le constat de l'élu des Nippes, invitant la société civile d'embrasser la cause en vue de forcer les autorités au pouvoir à prendre leurs responsabilités. Le parlementaire  voit que ces dernières ont adopté un comportement passif et complice face à la recrudescence de l'insécurité liée au kidnapping. "G9 en Fanmi et alliés a été créé par l'équipe au pouvoir. Ces gangs ont le sentiment de puissance et se sont sentis confortables à enlever des gens en toute tranquillité en appauvrissant la population", dixit le sénateur Francenet Dénius. 

" Le pays marche bien uniquement pour les hommes au pouvoir et la population est abandonnée à son sort", glisse un militant en colère. 

" Ensekirite ak enpinite pa dòmi nan menm chanb ak demokrasi", peut-on lire dans une banderole. 

Cette jeune dame se dit fatiguée. Elle est venue supporter le mouvement mais n'attend rien des autorités. "On est arrivé dans un bas-fond. La situation est critique. Je suis stressée au point que cela me donne de la migraine. On ne peut pas vivre avec cette peur. On a peur de nos semblables. La stigmatisation prend plus d'ampleur. Je me sens fatiguée et je n'en peux plus", martèle la militante. 

À l'issue de ce sit-in, des agents de l'ordre ont encore fait usage du gaz lacrymogène au moment ou une poignée de protestataires se sont allongés sur la chaussée pour exprimer leur indignation, leur souffrance face au kidnapping. 

 


Michel Césaire

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